Je ne crois pas au mythe de la critique constructive

Coeur de pierre

Tout commentaire nuit au processus créatif. Oui, c’est vrai. En vingt années de création, je l’ai constaté et vécu. Aujourd’hui, j’ai envie d’en parler, de dire ce que j’en pense.

Je ne crois pas au mythe de la critique constructive. Je crois aux conseils, aux suggestions, aux partages et aux échanges mais pas à l’intrusion. Personnellement, les critiques que j’ai pu recevoir ne m’ont jamais été utiles, elles n’ont fait que m’embrouiller, me faire douter, me paralyser, me dicter ce que je devais créer. En revanche, les conseils m’ont permis d’améliorer une technique, m’ont ouvert de nouveaux horizons insoupçonnés, m’ont donné des outils pour mieux m’exprimer sans jamais me dire comment le faire ni sur quoi le faire.

Ce que j’ai à dire, ce que j’ai à peindre me sont personnels, et au fond que cela plaise ou que cela ne plaise pas n’est pas le problème. Je ne veux pas être une autre personne, je veux être juste moi-même. J’exprimerai donc ce que je souhaite et comment je veux le faire. Je n’exprimerai pas ce que l’autre veut me faire exprimer.

Quand des personnes ressentent la nécessité de me faire remarquer qu’elles n’aiment pas les couleurs que j’ai utilisé, ou l’expression que j’ai donnée à mes personnages ou encore le médium que j’ai employé, je m’interroge… Et dans ces moments-là, j’ai simplement envie de leur donner tout le matériel nécessaire et de leur dire : « Vas-y, exprime-toi librement, fais-toi plaiz’. »

Souvent, je sais ce qui cloche dans ma dernière peinture, sculpture, etc. Je sais ce que j’aurais du corriger ou ce que je n’ai pas réussi à corriger. J’ai pleinement conscience qu’elle est imparfaite et j’ai accepté de la partager malgré tout. J’accepte également de ne pas voir ce qui saute aux yeux des autres. J’accepte mes limites, je lâche prise ;o)

Dans tous les livres traitant de créativité que j’ai pu lire, les artistes avouent à demi mot que la critique est une plaie et tournent autour du pot pour finir par lâcher un très consensuel : « mais parfois la critique vous aidera ! »

Quand ? Une fois que vous aurez démêlé toutes les projections de son auteur ? Quand vous comprendrez que c’est vous qui vous exprimez et pas l’autre ?

Je tiens à préciser que je ne souhaite museler personne, ce n’est pas le propos et ça serait sacrément gonflé après ce que je viens d’écrire. Par cet article, je souhaite simplement proposer des pistes de réflexions.

Je ne changerai pas les autres et ça ne m’intéresse pas de le faire. La seule personne que je peux aider dans ce monde, c’est moi.

J’avais donc deux options :

  1. Arrêter de partager mes peintures et autres créations pendant 6 mois, 1 an, voire davantage… Le temps d’apprendre à me détacher de tout commentaire.
  2. Ou me recentrer sur moi-même afin de comprendre ce qui me dérangeait *personnellement* dans la critique.

Dans le premier cas, ça voulait dire : pas de ventes, pas de vitrine pour mon travail. Sincèrement, je ne voulais pas non plus me couper du monde, j’avais envie d’être une grande fille, j’ai donc choisi de me recentrer sur moi-même. J’avais bien conscience que le problème, ce n’était pas les autres mais mes propres réactions face aux commentaires.

L‘an dernier, j’ai pris conscience à quel point je n’osais pas aller au bout de certains projets par peur du jugement des autres. Je me suis dit que c’était important de regarder en moi. Si je pensais que les autres n’aimeraient pas ces projets, c’est parce qu’au fond, c’est moi qui me jugeais durement. Et peut-être que je jugeais durement le monde dans sa globalité.

Le problème ne résidait pas dans le fait d’être aimé ou non, mais juste dans le fait d’aimer. L’amour englobe tout. Quand tu Aimes, être aimée en retour n’a pas d’importance, c’est juste plus facile. On se sent complet, il n’y a plus de manque. Voilà, j’y étais. Je commençais à travailler sur le non-jugement, à cultiver la bienveillance.

Alors, j’ai eu besoin de me formuler clairement ces questions, afin que, lorsque j’éprouverai à nouveau des doutes et des blocages, je puisse me les poser à nouveau :
  • Si je ne me sens pas aimée, si je pense que mon travail n’est ou ne sera pas apprécié, est-ce parce que moi-même je ne suis pas dans l’amour ?
  • Pourquoi est-ce que les propos des autres me font douter de mon travail ? Est-ce parce que je manque de confiance en moi ?
  • Je me sens jugée. Est-ce parce que, moi-même, je suis dans le jugement ? De moi-même, du monde dans sa globalité ?

Oui bien sûr. Une fois cela compris, la pire, la plus odieuse, la plus malveillante des critiques ne nous touche plus. Parce qu’elle ne nous appartient pas, nous y serons imperméables.

Voilà ce qui fonctionne pour moi : non-jugement, bienveillance, Amour et finalement détachement. Alors évidemment, je dois cultiver tout cela parce que je merdoie encore pas mal. Mais désormais, je sais que la seule façon de recevoir une critique, bonne ou mauvaise, c’est de la laisser me glisser dessus et de me concentrer sur ce que je veux exprimer, expérimenter, patouiller, créer ! Bref vivre pleinement cette vie.